Les mines de Yên Linh (Arroyo du Crocodile)
Les mines de calamine de Tuyên-Quang , Écho des mines et de la métallurgie 1918
Cette mine de calamine se trouve derrière la mine de Trang-Da, dans la haute vallée du torrent du Crocodile. Exploitée d’abord au sommet, à 400 m. d’altitude, avec un câble transbordeur descendant sur Trang-Da, le filon est maintenant exploité plus bas.
Six étages de galeries, sans parler des carrières à ciel ouvert, débouchent à diverses altitudes, entre 180 et 300 mètres ; On ne pouvait songer à remonter le minerai au faîte qui partage les vallées du Crocodile et de Trang-Da, pour profiter du câble transbordeur. Aussi, M. le commandant Cadars a-t-il été amené à évacuer le minerai par la vallée du Crocodile qui débouche en aval du fort Giovanelli.

- Tonkin - Tuyen Quang
Mines de Yen Linh - Pont sur l’arroyo du crocodile
éditeur L. Baud - #5979 ©2287
Il construit pour cela un petit chemin de fer à voie de 0 m. 60 d’une longueur de 6 km. Ce chemin de fer part d’un point, à 180 m. d’altitude, où aboutissent les câbles transporteurs amenant le minerai des différents plans (le chariot chargé descend par son propre poids et celui du minerai entraînant vers le haut le chariot vide : aucun mécanisme n’est nécessaire).
Le tracé extrêmement pittoresque suit ensuite le torrent, à travers la forêt, tantôt à flanc de coteau, tantôt accroché au rocher au-dessus d’un précipice, tantôt passant sur un pont ou quelque profond ravin.
Au km. 5.300, il aboutit à une plate-forme à la hauteur de la gueule de deux fours dont la construction vient d’être terminée. Au niveau de la base des fours est un vaste magasin pouvant contenir sur ses plates-formes de ciment plus de ?.000 tonnes de minerai calciné et d’énormes approvisionnements de sacs ; de là, le chemin de fer continue jusqu’à un embarcadère sur la rivière Claire (en aval de l’École d’agriculture), à 700 m. du magasin.
La voie est construite avec rails de 9 kg provenant du chemin de fer de Fai Foo (Annam) ; il vient d’être inauguré il y a quinze jours. Bien entendu, il a fallu, vu l’impossibilité de se procurer en Europe du matériel roulant (1er guerre mondiale), en improviser un plus grossier où les caisses en tôle à bascule sont remplacées par d’énormes caisses en bois à double plan incliné comme fond. Ce n’est pas beau, mais ça fait l’affaire ; pas de locomotive, la voie descendant avec une pente constante, il suffit à la descente d’un faible effort d’un coolie pousseur pour vaincre la résistance des courbes ; pour la montée, le matériel est poussé à bras d’hommes en attendant des bœufs.
Ce qui frappe surtout le visiteur à Yên-Linh, c’est qu’une si vaste exploitation minière n’emploie aucune force mécanique : amené par brouettes ou wagonnets du fond des galeries, il est, à leur sortie de terre, trié en gros et en menu par des femmes, sur une plate-forme aménagée dans quelque anfractuosité et, de là, glisse par les câbles, vers la tête de ligne du chemin de fer.
Plus tard, une laverie sera construite ; en attendant, on n’a vendu, depuis six ans que la mine fonctionne, que le minerai en morceaux, accumulant en tas gigantesques le menu mêlé de terre nécessitant un lavage. Il y a là plus de 150.000 tonnes de minerai qui ne coûteront pas un centime d’extraction le jour où la laverie sera installée ; à quoi il faut ajouter les stocks de calamine en morceaux, accumulés sur toutes les plates-formes en attendant la reprise de l’exportation et valant plus de 600.000 fr.
Le minerai de Yên-Linh est très riche et atteint, d’une façon générale, 5 % C’est triste de voir cette accumulation qui, en France, vaudrait 1 million, et qui doit rester là, sur le carreau de la mine, faute de fret. Et c’est le cas pour toutes les mines. La nature du sol à Yên-Linh nécessite, dans les galeries, un boisage formidable et la question du bois devient difficile.
Cela semble paradoxal lorsqu’on voit ces immenses forêts. Mais ce sont des forêts vierges, c’est-à-dire pauvres en bois utiles et très difficiles à exploiter. Il y a bien les fameuses réserves de l’Administration des forêts, mais chacun sait ce qu’elles sont : brousse ou forêt vierge sans valeur où tout ce qu’on a fait, ça a été de les entourer de poteaux avec la pancarte : réserves, mais l’industrie n’a pas devant elle l’éternité pour attendre de voir ce que l’Administration est incapable de jamais faire : de l’eucalyptus pratique.
La mine de Yên-Linh dispose de vastes espaces qu’elle va défricher pour y semer en plantation l’espèce de bois reconnue à la fois la plus convenable pour le boisage des mines et la plus rapide de croissance et, dans six ou sept ans, elle aura ainsi, sans difficulté, tout le bois nécessaire.
INDOCHINE 
